Chaque semaine, vous êtes nombreux à écrire des commentaires sous mes articles.
Je dois dire que pour l’instant, je n’ai pas été déçu puisqu’à chaque fois, vous me livrez vos réflexions qui m’aident à me remettre en question et à évoluer tout comme j’espère le faire via ces articles et podcasts associés.
Récemment, j’ai reçu un commentaire de Philippe auquel je souhaitais répondre plus en détail (Je préviens, c’est assez long) et qui m’interroge sur moi-même :
Rudy, ta fanophobie primaire me sidère.
Tu nous invites à ne pas être fan de qui que ce soit puis tu te demandes pourquoi le nombre de patreotes diminue… Je pense qu’il y a un lien direct entre ces deux faits. Toutefois, toi-même n’es tu pas allé chez Apple pour un téléphone à la suite de la lecture de la biographie de Steve Jobs ? Serais-tu tombé dans un piège de con-sommateur ?
Je vais tenter une analyse de l’origine de cette quasi haine que tu as à l’égard des fans. Bane (l’ennemi de Batman) est né dans l’obscurité et a été façonné par l’obscurité, Rudy Coia serait-il né dans la déception, aurait-il été façonné par cette déception ? Le vilains Mr O. « All Natty » ont-ils brisés les rêves de culturisme d’un adolescent français et voilà le résultat. 20 ans d’entrainement, une salle de musculation, une appli, un magasin en ligne de suppléments, une villa, une chaine Youtube et deux podcasts, tu es devenu le Bruce Wayne d’Annecy. Cette succès story à la française suscite de l’admiration auprès de tes auditeurs qui associent ton discours à celui que tu es. Cela étant en grande partie du au fait que tu t’applique tes recommandations, ton exemplarité alimentaire et ta rigueur sportive sont les portes étendards de ton discours. Comme tu le dis, un coach qui ne s’entraîne pas est un imposteur.
On associe énormément le discours d’une personne à cette même personne, c’est pour cela que l’on devient fan d’une personne tout autant pour son discours que pour ce qu’elle est ou que pour l’image que nous nous faisons d’elle.
Pour revenir sur cette fanophobie qui t’anime, je la trouve dommage car elle nous empêche de nous inspirer. Edouard Baer que j’admire pour son talent d’improvisateur a donné une interview dans laquelle il aborde ce sujet rapidement elle est ici : https://www.youtube.com/watch?v=TtQXP3nr4xQ
Comme tu le sais, c’est facile d’être d’accord avec quelqu’un qui va dans notre sens, mais vu que tu t’oppose dans ton discours à cette vision de fan je trouvais intéressant de pondérer cela. On peut être fan de quelqu’un, quasi aveuglément et un jour si nous sommes déçus par l’image que nous nous faisions de cette personne c’est une porte ouverte pour notre propre amélioration. « Je vais faire mieux que lui alors que je l’admirais ». Je suis certain que sans les déceptions que tu as subies tu ne serais pas là où tu es aujourd’hui. Du coup nous pouvons nous demander la valeur de cette déception sans laquelle nous n’aurions jamais pris les décisions que nous avons prises. Pierre Desproges disait : « On reconnait un véritable ami à sa capacité à nous décevoir ». On peut donc selon cette définition mesurer la valeur d’une amitié à l’intensité ou au nombre de déceptions que nous avons ressenties. »
Je vais donc tâcher d’y répondre dans l’ordre.
Mon premier smartphone était un HTC parce qu’à l’époque, c’était le concurrent numéro 1 d’Apple. Je l’avais justement acheté pour cela car je considérais Apple (Nous étions en 2010) comme l’ennemi à abattre.
J’en ai été content puis effectivement, j’ai lu la biographie de Steve Jobs que je vous conseille tous de lire et je me suis alors procuré un Iphone 4S juste après sa mort.
Pour soutenir tout son travail, sa philosophie, ses non-concessions, son état d’esprit rebelle, j’ai changé de téléphone.
Je pourrais trouver toutes les justifications possibles et inimaginables pour justifier cet achat mais avec le recul, oui, j’ai été un consommateur surtout que je n’en avais pas besoin, que ça n’allait rien changer à ma vie.
Quand je donne des « conseils » sur LeaderCast, beaucoup viennent de ce que je considère comme des erreurs que j’ai pu faire alors j’arrive, j’espère au moins en apparence, à comprendre ceux qui font ces erreurs actuellement. Vous devez sentir que ca sent le vécu.
Je ne me mets pas en avant comme le saint des saints, comme la perfection. La perfection est d’ailleurs bien fade, je trouve, bien plate.
J’aime les gens déséquilibrés au possible, je les adore même.
Ce sujet de la déception me parle parce que, oui, comme beaucoup, j’ai été déçu.
J’ai, comme tu le dis, été admiratif d’une image, de plusieurs images.
J’ai prêté des qualités imaginaires à certains, j’ai accordé du crédit à leurs paroles.
J’ai cru que quand quelqu’un disait qu’il était naturel en musculation, qu’il ne prenait pas de produit dopant, que c’était le cas.
J’ai cru que tout le monde était honnête et sincère alors j’ai appliqué tous les conseils que l’on me donnait.
J’ai cru que personne ne me voulait du « mal » (On pourrait débattre sur sa définition).
J’ai cru, comme une de mes élèves m’en parlait il y a quelques jours, que je pouvais compter sur les gens, sur tous les gens.
Et puis la vie m’a amené à être déçu. Je ne dirais pas à subir des déceptions mais à être déçu.
Je suis contre la notion de fan, je suis fanophobe d’après toi, parce que je n’ai pas envie et surtout que je ne le souhaite surtout pas, comme le dit Edouard Bear dans l’interview que tu as mis en lien : « Convaincre par l’imagination plutôt que par l’intelligence ».
Je n’ai pas envie de convaincre par les émotions, je n’ai pas envie de vendre du rêve.
Oui, parce que j’ai été trompé, j’y ai cru plus que tout.
Je veux convaincre par l’exemplarité, par la raison, par l’information.
Je ne veux surtout pas utiliser les stratagèmes expliqués dans des livres comme « Influence et Manipulation » ou « Le petit traité de manipulation à l’usage des honnêtes gens ».
Je n’ai pas envie et j’ai, en plus, horreur des biais cognitifs qui sont utilisés à foison pour nous vendre tout et n’importe quoi, pour faire de nous des consommateurs, pour nous faire voter à notre « insu ».
Je ne veux surtout pas prendre les gens pour des cons et comme tu le dis si bien, c’est mon positionnement.
Je ne veux surtout pas vendre du mensonge, de l’hypocrisie pour « gagner » au détriment des autres.
Je veux gagner avec les autres sinon ça n’a pas de sens pour moi.
Le Patreon est un bon exemple.
Je ne l’ai pas créé pour devenir riche, pour qu’il subvienne à mes besoins.
Je n’en ai pas besoin pour me payer un café.
Je l’ai créé pour la symbolique qu’il représente.
Parce que je crois et que j’en suis persuadé aujourd’hui que c’est un reflet d’une vision.
J’insiste souvent sur le chiffre 100 car c’est un chiffre rond mais si nous étions 200, 300, 400… Ce serait encore mieux.
Car cela me montrerait que ce mouvement « Ensemble pour faire mieux que seul » parle à de plus en plus de personnes.
Le nombre de Patreotes est un reflet de l’évolution de cette vision car tout le monde, absolument tout le monde peut mettre 2 dollars par mois pour encourager ce qui l’aide, pour ce qui est un cadeau (Cf ce Leadercast).
Alors quand je vois que « je perds », je devrais dire que nous perdons des Patreotes, j’ai l’impression que nous régressons.
Comme j’en parlais avec Hugo hier soir, un de mes anciens élèves en suivi-coaching et qui suit actuellement la Formation SuperPhysique, je vois dans la régression et la non-évolution du nombre de Patreote, mon propre échec.
J’y vois mon incapacité à « convaincre » ceux qui demandent à agir par choix et en connaissances de cause, à se remettre en question.
Malgré tout, parce que c’est moi, je ne renonce pas, je ne peux pas renoncer parce que j’estime que la vie, c’est agir, c’est faire, c’est ne pas abandonner.
Abandonner ? C’est la mort et je ne peux m’y résoudre car je suis convaincu, peut être à tort, que je peux changer, en partie, les choses.
Donc oui, je suis surpris quand je « perds » des Patreotes car cela signifie que certaines personnes « donnaient » peut être par fanatisme, pour un « rêve » que je vendais malgré moi.
Pour revenir sur le sujet de la déception,
Je prête, et c’est souvent qualifié de défaut par certains de mes proches, beaucoup de qualités à tous.
Je me concentre sur les qualités des gens, pas sur leurs défauts.
Ainsi, j’ai tendance à prêter des qualités que j’estime avoir à d’autres personnes.
Je comprends que j’utilise mon imagination et je comprends aussi, avec le recul, que l’on ne peut attendre des autres ce que l’on attend de soi-même, que chacun a ses propres « normes ».
En ayant relu plusieurs fois ton message Philippe, je me dis que je suis contre le fanatisme parce que je n’ai pas envie de décevoir.
Je n’ai pas envie que l’on me prête des qualités que je n’ai pas, que l’on m’invente une vie, des activités.
Je n’ai pas envie que l’on se trompe à mon sujet parce que je crois aussi qu’être déçu peut faire mal.
Je souhaite que ceux qui m’écoutent et me lisent comprennent que si je me bouge le cul, eux aussi le peuvent, que je ne suis pas un extra-terrestre, pas spécialement différent d’eux.
Je ne sais pas si tu as lu mon LeaderBook qui est le condensé de presque toutes les biographies et autobiographies que j’ai lu et qui recense donc tout ce que font ceux qui réussissent pour atteindre leurs objectifs mais franchement, décortiqué ainsi, je ne pense pas que quelqu’un oserait dit que c’est trop difficile, que ce n’est pas finalement accessible.
Je ne suis pas contre l’admiration, j’admire certaines personnes mais je suis contre le fanatisme que je différencie par l’absence de raison.
Je crois que la vie, comme je l’expliquais la semaine dernière, c’est d’abord soi avec soi alors en ce sens, j’essaie déjà de ne pas me décevoir quant à mes exigences, à mon insatisfaction permanente.
Je ne suis pas contenté, je ne suis pas spécialement fier de ce que j’ai entrepris, satisfait.
Tu cites une partie de mes projets mais, pour moi, ce n’est rien, ce n’était pas voulu, ce n’était pas programmé, c’est naturel.
Alors doit-on être fan ce qui est venu comme ça ?
J’oserais dire que non mais qu’on peut s’en inspirer. C’est d’ailleurs ce que j’expliquerais en détail dans mon livre qui sortira en décembre « The Leader Project ».
Tu le comprends peut être mais j’ai du mal avec l’irrationnel.
J’aime la raison, la logique, je n’aime pas ce qui n’est justifié en partie par les histoires que l’on peut se raconter et qu’on croit plus que tout.
Est-ce que j’empêche de s’inspirer de mon parcours en militant pour la raison ?
J’espère, en fait, inspirer ceux qui utilisent leurs raisons, qui vont se bouger pour réaliser leurs projets.
C’est encore une fois une question de cible, je ne veux surtout pas avoir comme j’ai pu le voir par le passé, des gens être fan aveuglément, me dire qu’ils adorent mon travail pour me rendre compte deux minutes plus tard qu’ils ne savent mais alors pas du tout ce que je fais.
Ça, ça fait du mal aux gens, de vivre dans leurs rêves, dans leurs imaginations, de ne pas mettre pieds à terre et d’ouvrir les yeux.
Oui, on peut rêver toute sa vie, c’est un choix mais ce n’est pas celui que je souhaite promouvoir et encourager.
La question n’est pas de faire mieux que moi, c’est une erreur qui est trop enseignée à mon sens. C’est de faire mieux que soi, c’est de faire différemment, à sa sauce, de s’affirmer.
Je pense que beaucoup d’entre nous sont à la recherche de ces différences parce que comme je ne sais plus qui le dit : « Si nous avons les mêmes valeurs, alors nos différences nous enrichissent ».
Essayez de faire mieux que son voisin en le copiant, ce n’est pas la société que je souhaite encourager. Je souhaite encourager l’innovation, pas la guerre, pas la réussite des uns au détriment des autres.
Est-ce que si personne ne m’avait jamais déçu, j’en serais là aujourd’hui ? Non, c’est une certitude. Je n’aurais pas eu ce « combat » qui m’anime chaque jour.
Mais qui sommes-nous en fait pour être déçu d’autrui ?
Nous avons déjà tellement à faire avec nous-même.
Être déçu des autres, c’est leur placer des attentes dont ils n’ont parfois même pas conscience et qu’ils n’ont que faire.
Comme l’a cité Michel dans un récent commentaire selon Henry David Thoreau : « Somme toute, il faut bien se rendre à l’évidence que mener une existence est à la fois très personnel et silencieux. »
Nous devons arrêter d’être déçu de tout et de rien parce que personne ne nous doit rien et n’a pas la même notion de la réciprocité, même si ça peut faire mal au cœur (émotion) parce qu’on n’a pas réfléchi plus loin que le bout de son nez.
Je pourrais lancer un autre débat, celui de devoir souffrir pour grandir ? C’est un sujet qui est d’ailleurs bien abordé, je trouve, dans le livre « 12 règles pour une vie » de Jordan Peterson.
Nous devons arrêter de juger tout ce qui se passe et je sais ô combien cela est difficile.
Je ne sais plus qui disait que les petits gens parlaient des autres tandis que les « grands » parlaient des idées.
Je préciserais que ceux qui réussissent parlent avec eux-même pour commencer, d’eux mêmes !
Nous n’avons pas être déçu de quoi (ou de qui) que ce soit parce que ce serait s’accorder trop d’importance comme si nous faisions la loi pour tous, nous qui avons déjà du mal à nous imposer nos propres lois.
Je ne suis pas du même avis que Pierre Desprogres.
Pour moi, un vrai ami est quelqu’un qui ne va pas te décevoir parce que vous êtes sur la même longueur d’ondes.
Peut être suis-je rêveur pour le coup mais si mes émotions prennent le dessus sur ma réflexion et que quelqu’un me déçoit, alors il ne peut plus être mon ami, il ne peut plus faire réellement parti de mon entourage et partir à la conquête du « soleil » à mes côtés.
Un véritable ami est celui qui ne te juge pas et sur qui tu peux compter, qui a les mêmes valeurs que toi.
Oui, je peux « pardonner » partiellement à quelqu’un qui m’a déçu mais pas complètement et pas au point de redevenir ami surtout si je considère cela comme une trahison. Je suis bonne poire mais pas super bonne poire non plus.
Le « problème » serait donc plus par rapport à ma vision de moi parce que ce n’est jamais assez, que je n’en fais jamais assez et que je n’ai pas envie de décevoir.
Je n’ai jamais l’impression d’en faire assez et je ne veux pas « vendre » de faux espoir.
Je ne veux pas que des gens imaginent et se trompent sur mon compte.
Alors c’est ma façon à moi de dire, quand je m’exprime au sujet du fanatisme : Ne me croyez pas plus beau que je ne le suis (Même si je suis très beau :D).
Je suis comme vous, avec mes qualités et mes défauts et si je peux le faire, vous le pouvez.
Voilà le message.
Rudy